Le Meccanographe


Idées ayant guidé la réalisation.

 

L'effet obtenu est d'autant plus beau que les motifs sont bien réguliers, qu'il n'y a pas de taches ni de recouvrement du trait sur lui même en fin de cycle. Une des difficultés à surmonter dans tous ces modèles est le problème du jeu dans les engrenages. Ce n'est en réalité pas trop difficile car les différents mécanismes tournent toujours dans le même sens. Il suffit pour remédier au problème de laisser tourner un peu le système avant de poser le stylo, afin que tous les jeux soient rattrapés. J'ai toujours utilisé cette technique manuellement avec mes précédents modèles. L'autre difficulté est d'arrêter d'écrire lorsque le stylo revient sur le trait de départ afin d'éviter un double trait disgracieux. Manuellement ce n'est pas si facile. D'une part, si le départ du trait est bien visible au début du dessin, il devient très souvent enfoui parmi d'autres une fois la rosace un peu plus avancée. La terminaison est alors hasardeuse et on gâche souvent un dessin en arrêtant trop tôt ou trop tard. Toute reprise après coup est impossible. Il arrive aussi souvent que l'on manque la fin par distraction, surtout lorsque l'on explique le fonctionnement de la machine à d'autres amateurs.
Les deux difficultés énoncées — absorption des jeux dans les engrenages et arrêt automatique — peuvent être résolus en même temps par un unique système qui dans un premier temps baisse le stylo après quelques instants de fonctionnement, puis le relève exactement au bout d'un tour de plateau.

 

Description générale du modèle.

fig. 1 - Vue générale du Meccanographe


Du point de vue du dessin, le mécanisme permet de tracer des rosaces comportant 57 motifs sur une feuille carrée de 21 cm de côté. Les motifs sont obtenus par le mouvement d'un chariot (1) portant le stylo qui dessine sur la feuille portée par un plateau (2) tournant 57 fois moins vite que le mécanisme actionnant le stylo. Le papier est tenu en place par des pinces (14)(fig. 2). Le levier (3) sert au relevage du stylo. Le maneton (4) assure un mouvement périodique régulier au chariot (1) portant le stylo. L'amplitude de ce mouvement peut être réglé pour varier les motifs en déplaçant ce maneton le long du diamètre du disque (fig. 8). Le chariot (1) est animé d'un mouvement dans l'autre direction par rotation de l'ensemble des rails sur le boggie (9)(fig. 3) qui le porte. Ce mouvement périodique peut avoir une amplitude variable selon la configuration que l'on donne à la came (5). On peut placer le stylo dans la zone de la feuille que l'on souhaite en jouant sur le trou de la bande (6) dans lequel passe le maneton et aussi en réglant la tige qui assure le contact avec la came (5). La commande (7) en façade est un changement de vitesse qui permet de sélectionner une vitesse double pour la roue portant le maneton. On a alors deux aller-retour du chariot pour un tour de la came (5). Enfin, la commande (8) permet de débrayer le plateau pour le faire tourner à la main ce qui, nous le verrons, est indispensable.

fig. 2 - Le stylo tubulaire est fixé sur un chariot coulissant.

fig. 3 - Gros plan sur la came et le boggie porte-rails.


La grande variété de motifs est obtenue en plaçant différentes chevilles (10) dans la flasque circulaire rouge. Ces chevilles constituent une came sur laquelle s'appuie la tringle (11) qui fait mouvoir les rails portant le stylo. La tringle (11) reste en contact avec les chevilles par l'action d'un poids (12) qui tire en permanence par des fils (13).

 

Le mécanisme dans ses grandes lignes.


Nous commençons par les principes généraux et nous verrons plus loin en détail le système de relevage automatique du bras.

fig. 4 - Vue générale du mécanisme du Meccanographe

La figure 4 montre les dessous de la machine. À gauche se trouve l'ensemble moteur assurant l'entraînement de tout le mécanisme. Le moteur électrique (15) provient d'une pompe de vidange de machine à laver. C'est un moteur sans balai dit à « cage d'écureuil » choisi pour son fonctionnement silencieux. Il entraîne par une petite poulie (16) de 12 mm et par une courroie (17) un train d'engrenages (18) qui assure une réduction convenable de la vitesse. Cette dernière n'est pas un paramètre critique, mais il est préférable de ne pas actionner trop vite le mécanisme pour avoir une meilleure qualité des dessins. À partir de l'axe de sortie à vitesse réduite on actionne en rotation :

— la manivelle (4)(fig. 1) qui assure le mouvement longitudinal du crayon,

— la came (5)(fig. 1) donnant le mouvement latéral du crayon,

— le plateau (2)(fig. 1) qui porte le papier.

Ces trois mécanismes sont actionnés dans l'ordre par les axes verticaux (19), (20) et (21).

fig. 5 - Le train réducteur et la boîte de vitesse

Le nombre de motifs et leur type sont déterminés par les vitesses relatives de ces trois éléments mécaniques. En (22) une boîte de vitesse propose deux rapports pour diversifier les dessins. Elle donne un rapport 1 ou 2 sélectionné par la position de la manette (7). Cette boîte est bien visible en figures 5 et 6. La force motrice à vitesse réduite est accessible au niveau de l'axe (23), figure 5. Cet axe reçoit la force motrice par la roue de 57 dents (24) et transmet le mouvement soit par la roue de 50 dents (25) soit par le pignon de 38 dents (26). Une rotation de l'axe (27) fait pivoter la manivelle (28) qui fait alors coulisser l'axe (29). Si les pignons de 38 dents (26) et (30) engrènent, les axes (23) et (29) tournent à la même vitesse. Si c'est la roue de 50 dents (25) qui engrène avec le pignon de 25 dents (31), l'axe (29) tourne deux fois plus vite que le (23). La figure 6 montre la boîte de vitesse avec le rapport 1/1 enclenché. L'axe (29) est maintenu dans sa position par le ressort (32) qui constitue un bistable avec la manivelle (28).

fig. 6 - La boîte de vitesse

fig. 7 - La commande du plateau

L'axe (23) entraîne l'axe (33) par un couple d'engrenages 19 dents (35) et 95 dents (34). L'axe (33) commande à son tour par une vis sans fin (37) la roue de 57 dents (36) portée par l'axe (20) du plateau et, par l'autre extrémité, l'axe (21) de la came par le biais d'un couple de pignons coniques de 26 dents. L'axe (29) entraîne l'axe (19) lui aussi par l'intermédiaire d'un couple conique. Cet axe entraîne la manivelle de commande du crayon par une démultiplication de 1/5 obtenue par une roue de 95 dents (42)(fig. 8). Il en résulte que la came et la manivelle tournent à la même vitesse si la boîte de vitesse est réglée sur un rapport 1/1. La manivelle tourne deux fois plus vite que la came si la boîte de vitesse est positionnée sur le rapport 2/1.

 

Étude de principe du mécanisme de relevage du stylo.


Il s'agit de réfléchir avant de bricoler, car le problème n'est pas totalement évident. La première idée qui vient à l'esprit est qu'un doigt fixé au plateau lève le stylo au bout d'un tour. Ce système direct est à écarter car, la lenteur de rotation du plateau rendra délicat le réglage du point de relevage. Par ailleurs, l'action de lever le stylo risque de demander un certain laps de temps : une action plus rapide est souhaitable. Pour que le mécanisme lève le stylo au bon moment, il faut que ce soit ce même mécanisme aussi qui l'ait abaissé. Il faut également que l'action qui lève le stylo intervienne exactement au même instant dans le cycle de dessin d'un motif que l'action qui consiste à le baisser. Tout retard d'une action par rapport à l'autre ne peut provoquer qu'une lacune ou un recouvrement dans le tracé. Par une action directe sur la position du stylo par un doigt fixé au plateau, il y aura toujours un décalage entre « lever » et « baisser ».

La solution retenue est la suivante : le stylo sera maintenu en l'air ou abaissé par la rotation rapide d'une roue portant une manivelle. À chaque demi-tour cette roue donne une position ou l'autre du stylo. À chaque tour du plateau cette roue doit faire exactement un demi-tour assez rapidement. C'est cette rotation qui est commandée par le doigt porté par le plateau. On voit que dans ce système la même action du doigt va produire le même effet à chaque tour, à savoir la rotation d'un demi-tour de la roue qui abaisse ou soulève le stylo. Pour que tout soit synchronisé avec les motifs du dessins, il suffit que ce demi-tour se fasse à la vitesse de la came principale définissant le motif. Si l'on note Vcame la vitesse de la came produisant un motif, la vitesse Vlevage est égale à Vcame/2.
À chaque tour de plateau, la roue de relevage doit être embrayée avec le mécanisme de la came, toujours au même moment dans le cycle de la came. On ne peut donc pas utiliser un embrayage traditionnel à base de roues d'engrenages car on ne contrôlerait pas le décalage angulaire de la roue motrice et de la roue menée au moment de l'embrayage (déphasage). On utilise plutôt un système de crabotage qui entraîne la roue de levage toujours au même endroit lors d'un tour de came.
Voilà pour les aspects théoriques. Nous présentons maintenant la réalisation en pièces Meccano de l'ensemble.


Système de relevage du stylo.

fig. 8 - La manivelle de va et vient du chariot et le levier de relevage.

Le stylo (38) est relevé par une rotation de tout le chariot (1) et des rails (40) sur lesquels il coulisse. L'ensemble rails-chariot est articulé en rotation autour de l'axe (41) ainsi qu'à l'autre extrémité sur un axe au niveau du boggie de roulement (9)(fig. 3 et 1). La tringle (3) est poussée vers le haut par l'intermédiaire de la tringle (44). En position baissée, lorsque la tringle (44) est en butée sur la bague d'arrêt (45), la tringle (3) ne touche pas la manivelle double (46) : le stylo repose par le poids du chariot sur le papier. La tringle (47) est juste un renfort pour éviter un décalage angulaire de la tringle (3) par rapport aux rails.

fig. 9 - Le mécanisme de relevage débrayé.

Les figures 9 et 10 montrent le mécanisme de relevage du stylo. Sur le gros plan figure 9, le système de crabotage est désembrayé, tandis que sur la figure 10 l'embrayage va avoir lieu, les deux équerres (48) étant sur la même trajectoire. La roue barillet (49) tourne en permanence à la même vitesse Vcame que la came. La roue barillet (50) est fixée dans une douille d'accouplement jumelée (43) à une autre roue barillet (51) portant un collier à tige fileté (52). Cet ensemble coulisse librement avec l'axe (53) qui entraîne aussi le pignon (54). Le mouvement de cet ensemble est limité vers la gauche par une autre roue barillet (55) fixée au bâti, portant dans chaque trou, sauf un, un collier à tige fileté (56). Les réglages sont faits de sorte que lorsque le collier (52) est juste dans le créneau créé par l'absence de collier de la roue barillet (55) (comme sur la figure 9), les deux équerres (48) ne se touchent pas. Dans le cas contraire (figure 10) elle sont sur la même trajectoire et la roue (49) va entraîner en rotation la roue (50).

fig. 10 - Le mécanisme de relevage.

Voici ce qui se passe dans l'ordre normal de fonctionnement. Au départ on est dans la situation de la figure 9. La roue (49) tourne sans entraîner la roue (50). Lorsque le doigt (57), directement lié à l'axe (20) du plateau (2), vient pousser le support double (58), la roue barillet (50) est entraînée vers la gauche par le système de tringles (59). Le ressort à boudin (60), de force légère, assure le retour en place de la roue barillet (50) une fois que le doigt (57) a échappé de la pièce (58). Le deuxième ressort (61), plus fort que (60), sert à absorber l'effort du doigt lorsque le ressort (60) est comprimé au maximum. Cela permet de retenir la roue barillet (50) en position un laps de temps suffisant pour que la roue barillet (49) viennent l'entraîner en rotation. Pendant cette rotation, le doigt (57) va échapper et la roue barillet (50) avec son équipage ne demande qu'à reprendre sa place sous l'action du ressort (60). Pendant cette rotation, la roue (50) ne peut pas revenir car le collier (52) n'est plus en face du créneau de la roue (55) et par suite l'entraînement se poursuit jusqu'à ce que le collier (52) retrouve son créneau libre. Il en résulte que lorsque l'embrayage a lieu, c'est toujours précisément au même endroit sur le cycle de la came, endroit précisé par la position du créneau et des équerres (48). Une fois l'embrayage amorcé, il l'est exactement pour un tour complet de came. À chaque tour du plateau le pignon de 25 dents (version longue) (54) fait exactement un tour, toujours au même instant précis du motif et donc la roue de 50 dents (62) ainsi que le maneton (63) font un demi-tour dans les mêmes conditions. Ce maneton est réglé de manière qu'un demi-tour sur deux il soulève la manivelle double (64) bloquée sur la tringle (44)(fig. 8) ou au contraire la laisse descendre.

fig. 11 a), b), c) - Réglage du mécanisme de relevage. Le point noir représente la manivelle au moment du début de l'opération de relevage, tandis que point blanc représente cette même manivelle au moment du début de l'abaissement.