J’ai parlé dans des articles précédents de la gravure des circuits imprimés (simple face). Même si dans les grandes lignes le procédé de gravure de feuille de métal pré-sensibilisé suit des principes identiques, il y a tout de même quelques difficultés supplémentaires à surmonter par rapport aux circuits imprimés.
En ce qui concerne les circuits imprimés je ne me suis jamais lancé dans le double face car un obstacle subsiste pour cette application : il faudrait pouvoir métalliser les trous de passage d’une face à l’autre ce qui n’est pas à ma portée.
Par contre la réalisation de pièces métalliques par gravure sur les deux côtés est tout à fait accessible comme on va le voir.
Dans un premier temps j’ai imprimé sur papier calque mes typons comme j’ai l’habitude de le faire pour les circuits imprimés électroniques. J’ai rapidement vu un problème : avec l’humidité de l’encre ou de l’air ambiant, le papier qui est très hygrométrique s’étire légèrement. Je le savais mais ce que j’ai découvert c’est que deux feuilles de calque venant de la même pochette peuvent avoir un étirement légèrement différent, même après séchage. La différence est infime mais à la loupe j’étais dans l’incapacité de superposer les deux dessins correctement aux quatre angles. Une petite différence subsistait qui aurait immanquablement conduit à rogner la fine bordure autour des ouvertures.
J’ai donc essayé la technique avec impression sur un transparent spécial pour imprimante à jet d’encre. Ceux que je possède sont très finement dépolis sur la face que l’on imprime. J’ai réalisé l’impression en noir en poussant le réglage de la quantité d’encre au maximum afin d’avoir une bonne opacité.
Comme le font tous les amateurs j’ai réalisé une pochette en collant par du scotch sur le bord mes deux typons l’un sur l’autre en veillant à la loupe à parfaitement superposer les dessins. Pour faciliter les choses, je découpe l’un des typon plus petit que l’autre. Le côté imprimé des transparents doit se trouver à l’intérieur de la pochette afin qu’il se retrouve directement en contact avec la plaque de métal. On évite ainsi le passage d’UV par la tranche du transparent. Du soin apporté à toutes ces opérations dépend la finesse du résultat.
Pour passer aux ultra-violets, j’ai encore diminué mon temps d’exposition. J’y ai été encouragé par une discussion glanée sur le forum de Loco-Revue. En fait 2 mn suffisent sans problème (alors qu’au départ je mettait le double). Il est très important par contre que le révélateur que l’on utilise ne soit pas resté à l’air dans sa cuvette toute une nuit, ni qu’il soit trop froid. En pratique il peut servir plusieurs fois à condition de le remettre dans une bouteille bien fermée et qu’elle soit presque pleine. J’utilise des flacons vides de 1 l ayant contenu des jus de fruit. Avant l’opération je n’hésite pas à chauffer le révélateur en plaçant la bouteille fermé dans un bac d’eau chaude. Je n’ai jamais eu de problème avec une température trop élevée, uniquement avec des températures trop basses. Il semble que tout se passe au mieux au delà de 25°C. Je pense que j’étais plus proche des 30°C ou même 40°C car l’eau du mon bain-marie puisée au robinet de l’évier de cuisine coule à environ 45°C. Le développement doit se faire de manière quasi immédiate. Dès que l’on plonge la plaque de métal dans le bain de révélateur on voit des filets violâcés dans le liquide et dans les 10 secondes le dessin apparaît. Je prolonge une minute environ l’opération en veillant bien à faire osciller doucement le liquide dans la cuvette pour que le vernis protecteur s’en aille partout où il le faut. Lorsque le dessin est bien net sur les deux faces, je retire la plaque du bain et je rince à l’eau claires pour arrêter l’action du révélateur. J’évite dans toute cette phase le plein soleil sans pour autant m’imposer de travailler dans le noir.
Je réalise ensuite la gravure dans un bain de persulfate d’ammonium chauffé à 50 °C. Je chauffe la bouteille en la mettant dans l’eau très chaude comme précédemment, puis je maintient la température avec la résistance chauffante de ma graveuse. Je trouve ce produit bien plus agréable à manipuler que le perchlorure de fer qui est très tachant.
Avec la gravure du laiton le bain passe d’une transparence totale (lorsqu’il est neuf) à une très belle teinte bleue donnée par les ions cuivriques (lorsqu’il est usé). Avec la gravure du maillechort, la couleur est brun-verdâtre. Dans les deux cas, plus la teinte s’accentue et plus le produit est usé. Faute d’avoir voulu pousser trop loin l’utilisation d’un bain, j’ai raté une gravure. Tout avait a priori bien commencé mais au bout d’un certain temps la gravure n’avançait plus, la solution ne contenant plus de substance active. Une telle situation n’est pas gravissime si on prend conscience de la cause au lieu de s’entêter à vouloir finir avec le même bain. Le problème est que si la gravure s’éternise le vernis finit par être affaibli et par ne plus protéger correctement la plaque. Ensuite si l’on change le bain pour du produit neuf, l’attaque se poursuit mais la gravure est désastreuse avec des trous non voulus et l’on ressort une dentelle inutilisable.
Si l’on se rend compte assez vite que cela n’avance plus il est préférable d’arrêter tout de suite pour continuer avec du persulfate d’ammonium frais. En fait je pense qu’un bain de 1,5 l réalise une seule gravure sans risque d’une plaque de maillechort de 0,3 mm mais bien sûr cela dépend aussi de la quantité de métal à enlever. Pour des gravures de décors en double face il est donc préférable d’utiliser un bain neuf à chaque fois surtout si l’épaisseur est de l’ordre de 0,3 mm ou plus. On peut économiser du produit par la conception des typons. Au lieu de creuser des trous de grande surface en les attaquant sur toute leur étendue, on peut simplement en découper le contour. Les morceaux tombent alors au fond du bac et on retire les chutes après l’opération avant de stoker le produit.
L’expérience des circuits imprimés est trompeuse car les quantités de métal à retirer sont très largement inférieures et le même bain peut réaliser l’attaque d’un bien plus grand nombre de plaques. L’épaisseur de cuivre sur un circuit imprimé est en général de 0,035 mm, c’est-à-dire 10 fois moins que ma plaque de 0,3 mm.
En conclusion, j’ai fini par réussir la gravure de mes rambardes mais cette opération demande beaucoup de rigueur. Le moindre écart dans la procédure et c’est l’échec ! La photogravure c’est un métier et je pense qu’il faut une certaine pratique pour bien maîtriser tous les paramètres. Si je découvre encore d’autres points importants sur le sujet j’en parlerai sur ce blog.