Titre les Trains du tertre
C04 — Un TCO tactile
dimanche 13 décembre 2020
Cet article présente un élément en cours d'élaboration depuis 6 ans environ : un tableau de controle optique (TCO) comme on en trouve dans les postes d'aiguillage. Je n'en ai jamais encore parlé car le projet était balbutiant et non prioritaire. La plupart des modélistes équipe leur réseau d'un TCO. C'est un élément qui évoque les TCO de la SNCF et qui permet d'avoir un coup d'œil global sur l'état des aiguilles d'une gare. Ce plan de gare en général affiche la position des aiguilles et l'état des voies à l'aide de voyants lumineux. Beaucoup d'amateurs y placent aussi des commutateurs associés aux aiguilles ou au signaux afin de les commander directement. Ce dernier point ne me plaisait pas car les TCO de la SNCF sont en général uniquement des moyens d'affichage et ne comportent pas de commandes, celles-ci étant réalisées par les moyens traditionnels : leviers ou manettes pour les postes plus récents mais placés sur un pupitre, le TCO étant quand à la lui affiché sur une paroi verticale au dessus. Cependant je trouvais dommage que le TCO ne m'offre pas le moyen de changer la position des aiguilles sans pour autant le couvrir de commutateurs en rien réaliste.
Ainsi a germé l'idée d'un TCO tactile. Je vais présenter ici les principes retenus même si l'objet n'est pas totalement réalisé. J'espère mener au bout cette réalisation si je ne tombe pas sur des problèmes insurmontables. J'ai de bons espoirs de réussir dans cette entreprise qui comporte de nombreux problèmes à résoudre dont la plupart ont trouvé des solutions. Les différents essais expliqués ici sont encourageant et, en fait, après la période de conception, j'en suis à présent rendu à la phase de fabrication.
Cet article ne parle que de la détection tactile. L'affichage est traité dans l'article qui suit.
On pourra aussi se reporter à l'étude de Jean-Luc sur son blog où il teste le même principe que moi pour un TCO tactile.
Par TCO tactile j'entend un tableau d'affichage d'une gare dont on peut changer la position d'une aiguille en touchant simplement une zone sensible sur le TCO. La première idée a été bien entendu de me tourner vers les techniques de détection du toucher. Les principales technologies existantes sont la détection résistive et la détection capacitive.
La détection résistive exige que le doigt établisse un contact par toucher entre deux électrodes. Le doigt étant toujours plus ou moins conducteur une électronique ad hoc permet de détecter le toucher par mesure du courant très faible circulant par le doigt. Le problème de cette technique est la qualité du contact qui doit garder ses caractéristiques au cours du temps (problèmes d'oxydation) et aussi les variations de conductivité du doigt selon les personnes ou les circonstances.
La détection capacitive est plus complexe à mettre en place à cause des capacités parasites pouvant interférer avec la mesure. Il existe des produits tout prêts répondant à la demande et en particulier des circuits intégrés spécialisés répondant réalisant cette tâche. Toutefois on est à chaque fois limité par les dimensions de la zone d'affichage dont les plus grandes dimensions sont de l'ordre de 20 cm. Mon ambition est de réaliser un TCO notablement plus grand afin de le rendre plus crédible et qu'il ne fasse pas double emploi avec la tablette graphique déjà en utilisation qui affiche des TCO miniature. Je pense à un TCO de 70 cm sur 25 cm environ afin de représenter la gare de Villard d'Avers.
Après ces premières études, je me suis tourné vers une solution maison qui est en train de se concrétiser. L'idée est de réaliser une détection par rayons infra-rouge de l'endroit pointé par le doigt. Imaginons un faisceau de rayons IR (infra-rouge) en horizontal et aussi un faisceau dans le sens vertical. Le doigt (ou autre obstacle) va couper un rayon horizontal et un rayon vertical. La connaissance des rayons coupés donne la position du doigt par ses coordonnées en X et Y sur le TCO. L'idée m'est venu suite à une étude de détection des trains par rayons IR pour le passage à niveau.
Cette solution est a priori viable car la résolution nécessaire sur le plan est assez faible, donc le nombre de rayons IR est assez réduit. Une grille de 3 x 2 cm est suffisante pour une représentation schématique du plan de gare. L'essentiel est que chaque aiguille soit dans une zone de détection qui lui est propre. Au moment où j'ai eu cette idée de détection tactile j'ignorais qu'il exitait des systèmes commerciaux vendus sous l'appelation de cadre infra-rouge. Leur coût ou leurs caractéristiques m'ont immédiatement conduit à l'idée de réaliser par moi-même un tel cadre. On trouve des cadres tout faits basés sur cette technologie dans le commerce mais si le coût est parfois envisageable, le nombre de points de détection (une dizaine) est alors trop réduit. Une réalisation maison me permet aussi de faire la dimension exacte qui me convient. Et puis sans parler du plaisir de la conception personnelle ! La technique du cadre infra-rouge a ceci d'intéressante qu'elle permet de détecter le pointage sur une grande surface cette dernière pouvant être un écran d'ordinateur ou de téléviseur, un panneau avec voyants lumineux ou un simple plan imprimé.
Après avoir dessiné un schéma de la gare de Villard d'Avers façon TCO, j'ai décidé d'étudier un cadre IR avec 32 rayons IR (10 en horizontal et 22 en vertical).
Un TCO tactile
Le plan de gare se présente ainsi. Les voies sont symbôlisées par des segments et les aiguilles repérées par un point jaune. Les points verts repèrent les dételeurs. Le quadrillage correspond aux faisceaux IR.
La détection de l'endroit pointé par le doigt se réalise de manière assez simple. Sur un côté vertical et un côté horzontal d'un cadre sont placées des leds infra-rouge. En face de chaque led sur le côté opposé du cadre se trouvent des photos-transistors aptes à détecter le rayonnement. Les leds vont être allumées par un programme dans un PIC qui réalise un multiplexage. Les 32 leds sont allumées à tour de rôle de manière cyclique assez rapidement (pendant 100 µs chacune). Le cycle complet est donc de 3,2 ms. Ceci présente de multiples avantages :
— la led n'étant allumé que 1/32e du temps, on peut lui envoyer un pic de courant plus fort que le courant permanent autorisé afin d'avoir un éclair plus fort facilitént la détection ;
— la mesure du rayon IR se fera sur un seul photo-transistor, celui en face de la led allumée ;
— la consommation de courant instantanée est limité à 200 mA au lieu de 32 x 100 mA = 3,2 A
— le multiplexage permet d'économiser de nombreuses sorties sur le microcontrolleur.

Le dernier point fait que cela n'a pas d'importance que la led IR éclaire aussi les photo-transistors situés à côté et non pas seulement celui en face. En effet le faisceau de la led est de 20° environ et arrose donc largement le côté opposé du cadre. Le problème est éliminé du fait qu'on teste uniquement le photo-transistor en face de la led avec une seule led allumée.
Le système infra-rouge
Schéma utilisé pour la détection par infra-rouge. La sortie en A est environ 5V si le photo-transistor n'est pas éclairé et 0V dans le cas contraire.
Des essais de détection ont été réalisés avec le photo-transistor SFH 313 FA-3/4 et la diode TSHF5210 (890 nm).
Ce photo-transistor de couleur noire a une très bonne sensibilité et possède un filtre contre la lumière visible. C’est très efficace puisque le transistor reste bloqué alors qu’il est en pleine lumière de la pièce du train (cette pièce n'a pas de fenêtre ni d'éclairage à incandescence)
Afin de pratiquer des essais, j’ai construit un banc constitué d’un tasseau portant la led IR et le photo-transistor à 80 cm l’un de l’autre (80 cm afin d’avoir une marge de sécurité par rapport au TCO qui fera 69 cm). Le résultat est concluant. Lorsque le transistor est éclairé la tension à ses bornes est de 0,21 V. Si l’on interpose le doigt elle monte à 4,99 (sous une tension de 5V et un courant de led de 100mA). Si l’on place une plaque de Plexiglas de 2 mm sous le faisceau, comme l’a mentionné Jean-Luc, le résultat est meilleurs et la tension tombe à 0,16V. Si on utilise une résistance de 22 kΩ au lieu de 10 dans le collecteur du photo-transistor le zéro est encore amélioré avec une tension résiduelle de 0,13V. À titre de comparaison, la tension résiduelle est de quelques millivolts lorsque la led IR est juste devant le photo-transistor.
Je n'ai fait aucune protection particulière contre la lumière ambiante en dehors du revêtement noir du transistor. L’expérience a été réalisée dans la pièce du train où le rayonnement infra-rouge est réduit.
Ce montage montre le point important à respecter : l’alignement le meilleur possible de la led et du transistor. Si l’un ou l’autre présente un petit angle, le niveau zéro remonte rapidement. Il faudra réaliser un étalonnage de la position de chaque led et photo-transistor lors de la fabrication du cadre ou bien trouver un moyen que le placement des composants se fasse immédiatement de façon précise.
La dernière remarque suggère que les leds IR et les photo-transistors soient insérés avec précision dans une pièce métallique et non dans du bois afin d’assurer la précision de placement. Même si le cadre est en bois on peut fixer les composants dans une plaquette métallique percée de trou Ø5 mm. Venant ainsi en appui sur une surface précise, l’orientation devrait ainsi être parfaite.
Pour saturer le transistor encore plus franchement, on enverra des pics de 200mA dans la led. Ceci semble possible d’après les caractéristiques de la led, le rapport cyclique étant de 1/32e et le temps d'éclairement de 100 µs.
Schéma du banc d'essai. Le plexiglas situé sous le rayon IR améliore grandement la détection car il revoie du rayonnement vers le photo-transistor.
Le photo-transistor SFH 313 FA possède une couche noire filtrant la lumière visible afin de le rendre sensible uniquement aux infra-rouge. Son temps de réponse est en principe suffisant pour effectuer la mesure en 100 µs d'après les données des datasheets.
Le banc d'essai avec le photo-transistor à un bout et la led IR à l'autre. la led étant alimentée en permanence, on a limité le courant à 100 mA pour les tests. Ceci donne une bonne marge de sécurité concernant la fiabilité de la détection.
Essais de barrière infra-rouge
Le photo-transistor de 5 mm est placé dans un petit tube. Il en est de même de la led IR. Le montage électrique est en l'air.
Essai d'éclairement simple. la tension tombe à 1,5V environ (point A du schéma électrique ci-dessus). Le zéro n'est pas très fiable
Essai d'éclairement avec un plexiglace. la tension tombe à 0,18V environ. Le zéro TTL est bien plus franc. Comme dans le montage définitif la led sera alimentée sous 200 mA on est assuré d'une détection fiable.
Quelques photos de TCO dans les postes d'aiguillage réels. C'est avant tout un moyen d'afficher des informations sur un panneau largement dimensionné.
Voilà pour la partie détection du toucher. Il reste à parler de l'affichage qui lui est plus traditionnel avec bien sûr des leds… mais pas seulement. C'est dans l'article suivant.

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